PORNIC, un an après

Texte publié le 25 janvier 2012.

Il y a un an…

…Le 25 janvier 2011, Nicolas Sarkozy
était en déplacement à Saint-Nazaire pour
un grand raout industriel fêtant la
commande de 2 navires de guerre par la
Russie et le lancement d’un appel d’offre
pour l’éolien offshore.

Pourtant, ce même 25 janvier 2011, c’est
en parlant de ce qui était déjà devenu
"l’affaire de Pornic" que le président entrait
dans la légende des SPIP.

Avant même d’avoir des éléments précis
sur la découverte du meurtre de Laetitia
PERRAIS, le président de la république
faisait le lien entre la commission de son
crime et la responsabilité individuelle de
collègues travailleurs sociaux. Il
annonçait des sanctions contre les
personnels du SPIP, une nouvelle loi
fondée sur son leitmotiv présidentiel "un
fait divers = une loi" et une chape de
plomb sur la responsabilité des pouvoirs
publics et la réalité des conditions de
travail dans les services. Il réitèrera sa
même démagogie lors du discours
d’Orléans, le 3 février, à l’encontre des
Magistrats de l’application de peines de
Nantes.

Le 27 janvier, l’administration pénitentiaire
ordonnait à tous ses cadres de vider les
placards de ces encombrants dossiers de
condamnés, de les affecter tous et sans
délai aux travailleurs sociaux déjà
débordés sans jamais se poser la question
de savoir comment ni pourquoi ils étaient
stockés là.

10 jours plus tard, en février 2011, le
rapport des services judiciaires et celui de
l’inspection pénitentiaire étaient dévoilés,
le premier dédouanant entièrement les
magistrats d’une quelconque responsabilité
individuelle, le second mettant hors de
cause les personnels d’insertion et de
probation nantais.

Par ailleurs, le ministre de la justice
reconnaissait que le SPIP de Nantes
fonctionnait dans un contexte très difficile
et considérait qu’une série de
dysfonctionnements incombaient à
l’encadrement du SPIP et de la DISP. Il
fallait un coupable pénitentiaire, le
directeur interrégional serait celui là.
Nous dénoncions à l’époque cette
obsession à vouloir mettre un nom sur
l’origine des dysfonctionnements quand ce
nom était évident : pénurie de moyens !
Ces fameux moyens qui nous permettraient
de prendre le temps de travailler à la prise
en charge globale du parcours du
condamné.

Mais le temps n’est pas le même pour un
CIP et pour un ministre alors Michel
MERCIER décida de mesures d’urgence
là où nous souhaitions une vision à long
terme, en imposant le développement de
la réserve pénitentiaire et un renfort
temporaire de contractuels quand il
aurait fallu penser plan pluri-annuel de
recrutement sur une base de 1
travailleur social pour 50 dossiers à
suivre.

Nantes, nouvel épicentre des SPIP de
France se trouva le premier doté de ces
renforts temporaires. Sur les chaises
musicales des contractuels ont pris place
aujourd’hui, 1 an après, 9 conseillers
d’insertion et de probation. Ces 9 là,
empruntés à d’autres sites moins sous les
feux de l’actualité, ne peuvent pourtant à
eux seuls résoudre la pénurie de moyens
humains à l’échelle nationale.
1 an après, les services de la région
croulent toujours sous une charge de
travail inconciliable avec leurs missions
d’accompagnement social et de prévention
de la récidive.

L’emballement médiatique s’est éteint, les
Conseillers d’Insertion et de Probation ont
accolé l’adjectif « Pénitentiaire » à leur
titre mais sur le terrain, la charge de travail
n’a pas diminué : la colère non plus.
Aujourd’hui, le Diagnostic à Visée
Criminologique se veut l’outil fort et
unique d’une redéfinition des modes de
travail sur fond de crise économique :
faute de moyens supplémentaires
indispensables, la solution serait de
réduire chaque condamné à sa
condamnation.

Hors concertation syndicale et contre les
revendications légitimes des personnels de
terrain, l’administration souhaite imposer
bureaucratie, rapidité et traçabilité. C’est
dans l’organisation des services
déconcentrés que l’on doit pouvoir trouver
des marges de manoeuvre, non dans
l’augmentation des effectifs jugés
globalement satisfaisants (!)

L’évaluation de la dangerosité doit à elle
seule prévenir la récidive : réalisée dans
des délais extrêmement contraints, sans
tenir compte des flux de population à
prendre en charge et en réduisant de fait le
temps consacré aux entretiens au profit du
temps rédactionnel, cette évaluation devrait
permettre d’éviter de nouveaux drames ?
L’incohérence de la démonstration suffit à
rappeler que nos revendications, pour aussi
simplistes qu’elles puissent paraître à
quelques décideurs gouvernementaux n’en
reste pas moins actuelles et légitimes :
 l’allocation et la ventilation cohérente
des moyens suffisants pour garantir une
charge de travail en adéquation avec
l’importance et la complexité de nos
missions ;
 des temps de formation, de supervision
et d’analyse des pratiques garantis ;
 des cadres en capacité de diriger,
guider, motiver et superviser leurs
équipes ;
 le développement de projets adaptés
aux problématiques identifiées des
populations prises en charge dans les
services et établissements ;
 une politique partenariale garante de
l’accès aux dispositifs de droit commun
pour tous ;
 les moyens d’une véritable politique de
recherche-formation, indépendante de la
seule commande institutionnelle, prenant
réellement en compte l’expertise des
professionnels.

Qui sait aujourd’hui ce que deviennent les
2 navires de guerre commandés par la
Russie ? Qui connaît le nom des heureux
élus qui développeront l’éolien offshore ?
Cherchez bien, la réponse est sûrement
dans un item du DAVC.

1 an après, les
problèmes sont
toujours posés.
Et notre volonté de
nous battre est
toujours intacte !